La plante du mois : Le Chêne des Canaries

La plante du mois : Le Chêne des Canaries

Le 17 juin 2022

Quercus canariensis Willd., Enum. Pl. : 975. 1809.
(Fagaceae Dumort., 1829)

Le « Chêne des Canaries » ou « Chêne zéen » est un arbre qui peut atteindre jusqu’à 30 mètres de haut. Contrairement aux espèces indigènes de la Méditerranée française, celui-ci possède des feuilles relativement grandes, caduques (souvent marcescentes, c’est-à-dire qu’elles sèchent à l’automne, passent l’hiver sur les rameaux et ne tombent qu’au printemps avec l’arrivée des nouveaux bourgeons) et composées surtout de lobes plus courts et plus nombreux que chez le Chêne pédonculé (Quercus robur L.) auquel nous sommes plus habitués.

Chêne des Canaries, écorce

Écorce

Chêne des Canaries, port général de l'arbre

Port général de l’arbre

Chêne des Canaries, détail des feuilles

Détails des feuilles

 

Malgré une appellation paraissant évidente quant à son origine, le dénommé « Chêne des Canaries » ne pousse pas aux Canaries. Les travers de la nomenclature ont raison d’une indication géographique des plus informatives, pour laisser place alors à un nom ambigu.

Lorsque le célèbre botaniste et pharmacien berlinois, Carl Ludwig von Willdenow (1765-1812), publie trois ans avant son décès son ouvrage « Enumeratio Plantarum Horti […] », il utilise du matériel récolté par le naturaliste et directeur du Jardin des plantes de Montpellier, Auguste Broussonet (1761-1807) pour décrire son nouveau Chêne. Le problème est que Willdenow, dans son ouvrage, pense que les plantes herborisées proviennent de Tenerife aux Canaries alors qu’elles ont pour origine le Midi de l’Espagne, en Andalousie, où Broussonet a séjourné à plusieurs reprises, d’où l’épithète spécifique canariensis.

Est-ce lié au fait que Broussonet, nommé par Napoléon Bonaparte, fut commissaire en charge des relations commerciales de la France aux îles Canaries ? Fait marquant, l’étiquette associée à la part d’herbier déposée à l’Herbier de Berlin (B) fait mention de la localité « Tenerife ».

Quoi qu’il en soit, l’histoire de ce nom et du mélange des genres ne reflète par conséquent pas la répartition du mal nommé « Chêne des Canaries » puisque cette espèce est endémique de l’Afrique du Nord et de la péninsule ibérique. Il existe cependant aujourd’hui quelques représentants plantés çà et là en Provence siliceuse, notamment dans le Var.

Quercus canariensis Willd. in GBIF Secretariat (2021)

Carte de distribution Quercus canariensis

Le Domaine du Rayol abrite trois spécimens plantés probablement il y a plusieurs dizaines d’années du coté du Chili d’altitude, proche de l’œuvre de land art de Cornelia Konrads (2015). À bon entendeur !

Jérémy Tritz
Botaniste, responsable scientifique au Domaine du Rayol

Bibliographie :

– Herbarium Berolinense version : 15 Jun 2022. Digital specimen images : Data Publisher : Botanic Garden and Botanical Museum Berlin. Image [ID: 200384.]
https://ww2.bgbm.org/Herbarium/specimen.cfm?Barcode=BW17608010
– Tropicos Missouri Botanical Garden. (15 Jun 2022)
https://tropicos.org/name/50276099
– WilldenowI, K. L. (1809). D. C. L. Enumeratio Plantarum Horti Regii Botanici Berolinensis, continens descriptiones omnium Vegetabilium in Horto dicto cultorum. Berolini, 1809.  1186 pages.
https://www.biodiversitylibrary.org/item/275519#page/991/mode/1up
– GBIF Backbone Taxonomy. (2022-06-17) Checklist dataset accessed via GBIF.org
https://doi.org/10.15468/39omei