Le 6 août 2025
Iglika Christova & Jacques Tassin
Pour cette première édition de la résidence Entre-Autres, le jury a retenu le projet La langue des semences, porté par le duo formé par Iglika Christova, artiste plasticienne, et Jacques Tassin, écologue et chercheur au CIRAD.
Leur démarche propose d’entrer en relation avec les semences, ces fragments minuscules du vivant à la fois porteurs de langage, de mémoire et de devenir. Il ne s’agit pas ici d’interpréter ou de traduire un message, mais d’écouter ce qui s’exprime en silence. Semer devient alors une forme d’adresse, un acte de communication avec d’autres qu’humains, un geste à la fois poétique, scientifique et politique.
En tissant des liens entre observation scientifique, dessin symbolique, écriture, transmission orale et méditation sensorielle, le duo explorera les multiples dimensions de la graine comme forme de langage végétal, mais aussi comme figure métaphorique de nos sociétés : ce que l’on transmet, ce que l’on porte en nous, ce que l’on disperse ou enfouit.
Leur projet, à la fois minimal et puissant, s’inscrit avec justesse dans l’esprit de la résidence : une tentative d’écoute et de lien avec le vivant non-humain, qui ne cherche ni à s’approprier, ni à expliquer, mais à dialoguer autrement.
Au fil de leurs temps de présence au Domaine du Rayol et de leurs échanges avec les lycéens, les habitants et les visiteurs, Iglika Christova et Jacques Tassin inviteront à réapprendre à parler lentement, à l’échelle des semences, à penser avec plutôt que sur.
Iglika Christova est plasticienne et Docteur de l’Université Paris I Panthéon – Sorbonne en Arts et Sciences de l’art. Elle s’inscrit dans une recherche interdisciplinaire au croisement du dessin et de la biologie. Iglika Christova est auteure des livres Art & Microbiologie paru aux Éditions Jannink / Les Presses du réel en 2021, et Penser et créer avec le microcosme. Du dessin d’observation au dessin vivant, paru aux éditions Alos (Sofia) / Les Presses du réel (France) en 2024, où elle explore un acte artistique contemporain né de l’apport de la microbiologie.
Jacques Tassin est chercheur en écologie au Cirad depuis 35 ans, selon quoi il a séjourné dans des paysages tropicaux parfois très lointains, et a découvert les manières dont les plantes voyagent, avec ou sans intercession humaine. Après un doctorat en écologie végétale, il a soutenu son Habilitation à Diriger les Recherches sur les « cheminements de semences (dispersion, immigration, introduction) ». Il a longtemps travaillé sur la germination, en particulier sur les traits de vie des semences, dont l’observation permet de décrypter d’éventuels mécanismes de dormance.
Les semences suscitent de sa part un intérêt croissant. Sa dernière communication dans un colloque s’intitulait « Pour une philosophie des semences », et sa dernière balade-conférence portait également sur les semences : semences vivantes, mais également semences en terre cuite, façonnées par son épouse céramiste.
Ce chercheur atypique et sensible revendique un esprit peu disciplinaire et une aversion naturelle pour les segmentations. Il ne s’est jamais interdit d’insuffler de la poésie dans l’écriture scientifique afin d’apporter des éclairages que les sciences seules sont en peine de fournir. Il a lu quelques philosophes, notamment Bergson et Merleau-Ponty, dont la reconnaissance des mondes sensibles a infléchi son regard.
Il envisage avec attention les rapprochements entre arts et sciences, mais aussi sciences et sociétés. Il est souvent intervenu auprès du grand public à l’occasion de conférences, de tables rondes et d’émissions de radio. La publication d’une vingtaine d’ouvrages, dont dix chez Odile Jacob, lui a offert un vivier de sollicitations pour assurer ces interventions. Il ne considère pas la science comme apte à se suffire à elle-même. En ce sens, il a récemment organisé, à l’Académie d’Agriculture de France dont il est membre, une session sur les sciences de la vie au sein de laquelle s’inscrivait un volet sur les interactions entre arts et biologie.
Composition du jury 2025 :
- Agnès Foiret-Collet, présidente du jury, et enseignante-chercheuse en arts plastiques à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
- Gilles Clément, jardinier, créateur du Jardin des Méditerranées
- Nolwenn LANDRY, responsable actions culturelles au Domaine du Rayol
- Isabelle Milliès, conseillère action culturelle et territoriale à la DRAC PACA
- Ricardo Vazquez, directeur de la culture, des sports et de la jeunesse du département du Var
- Laurent et Sylvie DUPUY, mécènes et ingénieurs horticoles – Ecole nationale d’Angers
- Thierry Gauquelin, Professeur émérite Aix Marseille Université – OSU Pythéas -IMBE UMR CNRS-IRD-Univ Avignon
